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  • Nanou de Créalma

Nos stresseurs internes : les pilotes de personnalité


On sait bien maintenant car cela a été très largement publié et diffusé, que le fonctionnement de l'adulte et amplement conditionné par les bases acquises dans son enfance et sur lesquelles il s'est construit.

L'enfant tout petit est comme une éponge, il absorbe littéralement son environnement, tout ce qui se passe dans son environnement, il y a un don naturel pour ressentir les autres êtres. De ce fait, il baigne dans leur façon d'être, dans leurs états d'âme, et il finit par s'en imprégner par capillarité, comme un tissu s'imprègne d'une couleur dans le bac de teinture dans lequel il séjourne.

Un peu plus grand, l'enfant commencera à imiter ce que feront les êtres environnants (c'est ainsi qu'un enfant élevé parmi des loups se comportera comme un loup…).

Dans sa famille l'enfant imitera son père, sa mère, ses aînés, sa nourrice ou tout autre familier.

Un peu plus tard encore il imitera ses professeurs et toute personne qu'il considérera à tort ou à raison comme référente.

Par ailleurs, il commencera à intégrer un certain nombre de notions entendues ici ou là, quelquefois banales, mais qui pourront néanmoins laisser quelques séquelles : « c'est tout son grand-père ! », «t'es bien comme ta mère, tiens !».

Enfin un peu plus tard encore, on commencera à exiger de l'enfant qu'il corresponde à l'image que l'on se fait de lui.

Ce sont les conséquences de ces exigences parentales qu' Éric Berne, a appelées "drivers" (en français : stresseurs ou pilotes de personnalité) et classées en 5 catégories en fonction de l'injonction explicite ou sous-entendue qui est faite à l'enfant :

  • 1ère catégorie : injonction « sois parfait !»

  • 2e catégorie : injonction « dépêche-toi! »

  • 3e catégorie : injonction « sois fort! »

  • 4e catégorie : injonction « acharne toi ! Fais des efforts ! »

  • 5e catégorie : injonction « fais plaisir !»

Pour répondre à une question, j'exposerai dans cet article comment chacun de ces stresseurs peut s'installer dans l'enfance et par quels comportements il se traduit à l'âge adulte, en me limitant à l'aspect descriptif.

Si la demande m'en est faite, je développerai ultérieurement l'aspect préventif.

L'aspect curatif étant, quant à lui, du ressort du domaine thérapeutique et individuel (car il y a autant de cas que de personnes !)

1°-"Sois parfait !"

Cette injonction est celle qui est véhiculée, de manière implicite ou explicite, par le discours et le comportement de parents qui rêvent d'avoir un enfant sage, bien élevé, propre, bon élève, brillant etc.

A leurs yeux, il n'est pas admissible que l'enfant fasse des bêtises. Lorsque cela se produit il est réprimandé, parfois sévèrement et fortement, parfois de manière plus insidieuse sous forme de chantage affectif : je suis très déçue, j'attendais mieux de toi etc.

L'enfant dont l'objectif ultime est toujours la recherche de l'amour de ses parents comprendra assez rapidement que pour être aimé il doit se conformer à l'attente de son entourage.

Tout petit, il s'appliquera donc à réussir tout ce qu'on lui demande de faire, mais aussi tout ce qu'il fait spontanément, même dans ses jeux il se contrôlera pour ne pas salir, ne pas casser, ne pas détériorer, ne pas se laisser aller à faire un gribouillage ou quelque chose « qui ne ressemble à rien ».

Il aura toujours à cœur de faire « une belle construction », « un beau dessin », et de réussir, gagner, être le meilleur, être irréprochable… afin de ne pas encourir de reproches, afin de ne pas décevoir et surtout de ne pas risquer de perdre l'amour de ceux qu'il aime.

À l'âge adulte ce comportement sera bien engrammé et l'individu s'interdira constamment l'échec, l'erreur ou même l'approximation.

Il aura toujours peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas être assez bien, de ne pas faire ses preuves, de ne pas être reconnu comme compétent etc (ce qui pourra d'ailleurs le conduire à la procrastination !).

Il aura toujours besoin du retour des autres sur son travail : « c'est bien! », « Formidable, qu'est-ce qu'on ferait sans toi ! » et s'entourera volontiers de personnes plus âgées que lui.

La moindre petite remarque ou réflexion suggérant que son travail est perfectible ou modifiable fera surgir en lui un bouillonnement d'émotions à valence négative («je suis dégoûté»).

À la longue, le milieu professionnel étant souvent peu bienveillant, ce type de personne finira en grande souffrance, dans un stress permanent dû au désir de bien faire, et un mal-être généré par ce qu'elle considérera comme un manque de reconnaissance.

Le stade suivant sera la somatisation, et les pathologies commenceront à se développer, tout d'abord bénignes puis plus lourdes (pathologies souvent digestives).

Une autre conséquence de ce stresseur et le comportement social de la personne.

Extrêmement jugeante, critique et exigeante envers elle-même, elle le sera naturellement envers les autres.

Ainsi, elle se positionnera de manière naturelle dans des postes de contrôle, de vérification, d'encadrement ou d'inspection où elle fera preuve d'une tolérance limitée, exigeant un travail toujours plus important en quantité et mettant la barre toujours plus haut quant à la qualité.

C'est typiquement le genre de supérieur hiérarchique qui vous dira « j'attendais mieux, je sais que tu peux mieux faire » s'il est courtois ou carrément « ce n'est ni fait ni à faire » s'il est un peu moins policé.

2°-"Dépêche-toi !"

Cette injonction est très souvent exprimée telle quelle, lorsque l'enfant traîne, met du temps à s'habiller ou à faire ses lacets, lève le nez au lieu de finir son assiette, continue à jouer alors qu'on l'a déjà appelé trois fois etc. les exemples ne manquent pas !

Elle est plus implicite dans certaines remarques parentales : « je suis prêt, je t'attends », « papa a déjà démarré la voiture et tu n'as pas encore mis tes chaussures »… ou même dans certaines attitudes des parents qui ont fini (de manger, de s'habiller etc.) avant même que l'enfant ait commencé.

Le petit va assez rapidement en déduire que s'il arrive tard, trop tard, il est mal aimé. Il pourra alors développer deux sortes de réactions

  • soit il acceptera le driver et se mettra à tout faire très vite, mal ou incomplètement

  • soit il abandonnera avant même d'avoir commencé, se disant que de toute façon il ne sera pas dans les temps et que, quitte à être mal aimé, autant ne pas se donner de mal. Cette seconde attitude sera volontiers renforcée par le comportement des parents qui, pour gagner du temps, « aideront » l'enfant (comprenez qu'ils lui mettront son manteau, qu'ils feront ses lacets, que peut-être ils le porteront jusqu'à la voiture etc. »), mais il s'agit là d'un autre sujet car, dans ce cas de figure, l'enfant n'endossera pas le driver.

L'adulte « dépêche-toi » vivra toujours dans l'urgence d'avoir fini.

Il marchera vite, il parlera vite, il mangera vite... et sera difficile à suivre.

Extrêmement réactif, il perdra peu de temps à analyser un projet et préférera le mettre rapidement à exécution quitte à ce que sa réalisation soit peu fignolée et imparfaite au bout du compte. Ce qui comptera pour lui avant tout, ce sera que ce soit fini.

Rapide, donc et souvent assez efficace si l'on n'est pas trop exigeant sur la qualité du soin et de la réalisation, il sera capable de cumuler les tâches et on l'appréciera pour cela.

Au plan social, en revanche, il sera considéré comme fatigant et ses collègues ou amis finiront par s'essouffler à essayer de le suivre, le laissant se débrouiller tout seul avec son rythme effréné.

Bien sûr cela n'aura qu'un temps et il sera assez rapidement rappelé à l'ordre par son corps qui aura besoin de repos et qui, s'il ne le trouve pas, ne tardera pas à refuser de fonctionner (pathologies cardio-vasculaires) !

3°- "Sois fort !"

Baigné dans une atmosphère de défiance et de faux-semblants, cet enfant sera habitué à se méfier de tout le monde et à ne pas se livrer tel qu'il est.

Il apprendra très jeune que pour ne pas prendre de risque il faut paraître fort aux yeux des autres, même si on ne l'est pas.

Il entendra un certain nombre de clichés : « un garçon ça ne pleure pas », « il faut souffrir pour être belle, sois courageuse », « arrête de pleurnicher, on dirait une poule mouillée » etc. qui l'amèneront rapidement à considérer que :

  1. la vie est un combat et que le meilleur gagne, or le meilleur c'est le plus fort ou celui qui paraît le plus fort

  2. montrer ses émotions, c'est montrer ses faiblesses donc pour ne pas être vulnérable il faut se montrer impassible.

  3. On ne peut compter que sur soi-même, il faut se débrouiller tout seul dans la vie, et même si c'est risqué, il vaut mieux se mettre en danger tout seul que face aux autres.

Devenu adulte cet enfant-là ne changera rien à son comportement : il refusera d'écouter sa fatigue, d'accueillir ses émotions, de montrer sa vulnérabilité.

Même dans les situations difficiles ou inextricables dans lesquelles il saura si bien s'empêtrer, il mettra un point d'honneur à se débrouiller seul au mépris du danger ou de la souffrance, refusant de demander de l'aide car il considère cela comme une attitude méprisable.

Au plan social c'est quelqu'un qui sera également très dur avec les autres, comme il est avec lui-même.

Habitué à être fort, "le plus fort", il se situe naturellement position de chef, car il aime dominer "les plus faibles" (souvent les plus jeunes) envers lesquels il a volontiers une attitude condescendante.

Reproduisant ce qu'il a subi étant enfant, il ne tolérera pas les démonstrations de faiblesse provenant de son entourage.

Cette rigueur, cette exigence envers lui-même et envers son propre corps pourront le conduire à faire fi des signaux d'alarme, à ignorer les symptômes et les douleurs, et à laisser se développer les pathologies jusqu'à ce qu'il soit trop tard (pathologies générant des douleurs vives).

4° - "Fais des efforts, acharne toi !"

Les parents qui veulent voir réussir leur enfant à tout prix seront porteurs de cette injonction assez insidieuse car elle pourrait passer pour un encouragement : « allez vas-y, fais-le, encore, cours plus vite, monte plus haut, prends-en plus… ».

Plutôt que de grandir tranquillement et de progresser à son rythme, cet enfant sera toujours tiré vers l'avant et il ne fera la fierté de ses parents que s'il est capable de faire mieux que les autres enfants et plus tôt.

Il sera typiquement l'élève sans facilité particulière mais qui sera toujours premier de la classe à force de travail et d'exercice cent fois recommencés.

Celui à qui l'on dit lorsqu'il demande à aller jouer avec les copains « tu ne veux pas plutôt regarder un documentaire ? ».

Celui qui se retrouve inscrit dans un club de sport à faire des compétitions le dimanche alors qu'il rêvait d'apprendre le piano ou de faire de la peinture…

Tout est mis en place autour de lui pour que cet enfant n'ait jamais la vie facile, car lorsque c'est trop facile, on n'a aucun mérite ! Chez lui, on ne tolère ni l'à-peu-près ni le farniente : on fait toujours quelque chose et on le fait à fond.

À l'âge adulte cet individu sera quelqu'un de très actif, très impliqué, très investi, recherchant toujours le dépassement de soi est toujours prêt à aider les autres pour qu'ils en fassent autant. Lui ne cherche pas à passer devant les autres, il fait du prosélytisme, il faut que tout le monde s'implique, s'efforce, réussisse.

Il monte des associations, construit des groupes, met tout le monde au pas dans un grand désir de réussite collective qui portera le groupe vers la victoire… oui c'est très dur, mais ensemble nous réussirons ! Et plus c'est difficile, plus il y a de mérite à réussir, plus la gloire grande !

Il est normal que les choses soient difficiles et c'est même gratifiant de rencontrer des difficultés, cela renforce l'estime de soi.

Par contre en cas d'échec, il aura tendance à se désolidariser du groupe et à rejeter la faute sur celui ou ceux qui n'auront pas fait assez d'efforts pour permettre la réussite.

Doté d'une grande volonté, c'est quelqu'un qui saura aussi « faire des efforts » pour entretenir sa santé : faire de l'exercice, manger sain et équilibré, se coucher tôt et se lever de bonheur pour faire son yoga, sa méditation, sa gym, son jardin… d'ailleurs à ses yeux, ceux qui font la grasse matinée sont des paresseux…

5° -"Fais plaisir !"

C'est l'enfant qui cherche la proximité de ses parents et qui se fait rabrouer parce qu'ils n'ont pas le temps, qu'ils sont fatigués, ont mieux à faire que de s'occuper de lui, et qui se rend compte qu'il reçoit des câlins et des félicitations lorsqu'il leur fait plaisir en leur apportant leur journal, en mettant la table, en proposant ses services ou son aide etc.

Il va donc intégrer le message que pour être aimé il faut faire plaisir et se mettre à faire passer la recherche du plaisir des autres avant son propre plaisir. Il proposera d'aider ses parents plutôt que de faire quelque chose qui l'intéresse ou qui l'amuse par exemple.

A l'âge adulte, bien sûr, il formulera cela autrement, pensant que s'occuper de soi au lieu de faire ce qui plaît aux autres c'est être égoïste.

C'est quelqu'un qui fera tout pour ne pas faire de peine, pour soulager la tristesse et qui, comme par hasard, sera en général entouré de personnes qui useront de chantage affectif pour entretenir son penchant naturel. Il considérera cela comme normal car pour lui, depuis l'enfance, pour être apprécié et estimé il faut être dévoué.

Il aura donc tendance à participer à des œuvres humanitaires, à choisir un métier qui repose sur le dévouement, sur l'oubli de soi-même, quitte à être exploité car c'est quelqu'un qui ne sait pas dire non : on peut toujours compter sur lui pour prendre des heures supplémentaires, remplacer le copain qui se marie ou aider à un déménagement même s'il est au bord du lumbago.

Lorsqu'il est malade ou empêché, il s'excuse abondamment de ne pas pouvoir aider, il est important pour lui qu'on lui pardonne cette défection, qu'on ne lui en veuille pas, et surtout que la prochaine fois on n'oublie pas de lui redemander son aide ! C'est comme ça qu'il se sent reconnu et apprécié.

Il a une forte tendance à la dépendance affective que ce soit dans la vie privée ou dans la vie professionnelle, il aime être aimé et s'il ne l'est pas il est en grande souffrance et peut remplacer cette dépendance par une autre, tombant alors volontiers dans une addiction quelconque ( tabac, médicaments, drogues).

C'est quelqu'un qui à l'extrême pourra tomber dans la dépression car s'il s'emploie à toujours faire plaisir aux autres il ne se fait jamais plaisir à lui-même et n'ose jamais demander aux autres de lui faire plaisir.

*****

Voici terminé ce petit tour d'horizon des 5 pilotes de personnalité qui peuvent si facilement devenir nos stresseurs et nos saboteurs. Bien entendu, comme toute classification, celle-ci a ses limites. Tout d'abord, on n'est jamais "pur" quelque chose ; ainsi, on peut avoir deux ou trois pilotes, dont un dominant. Ensuite, tout n'est pas mauvais dans ces tendances, et lors d'un coaching, on prendra soin d'en garder les aspects positifs qui se convertiront, une fois débarrassés de leurs comparses invalidants, en atouts et en compétences appréciables ! Faites confiance à votre coach, c'est un professionnel dont la compétence est de vous aider à faire le tri pour ne conserver que le meilleur.

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